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HISTOIRE DU PARNASSE

Cet adieu à la poésie est prononcé d’une voix si forte et si jeune, si bien maîtresse de ses nuances, qu’on attend, après ce Consummatum est, un Sursum corda ! En effet, trois ans après, donnant son avis dans une enquête sur la poésie, Frédéric Plessis, en un retour d’esprit parnassien, exprime, avec une vigueur et un mépris dignes de Leconte de Lisle, ses sentiments sur le Symbolisme qui a prétendu affranchir le vers en y introduisant la musique : « le progrès, dans un art, se manifeste par des restrictions et des exigences, jamais par l’affranchissement… Il se traduit aussi par les distinctions, par le renforcement de l’indépendance vis-à-vis des autres arts, jamais par des confusions et la prétention à rendre ce qu’il n’est pas dans son rôle et dans ses moyens d’exprimer[1] ».

Cette étude serait incomplète si l’analyse littéraire ne distinguait pas, dans la lumière blanche de ce pur talent, le rayon chrétien. M. Paul Bourget, développant cette pensée, qu’il n’y a pas de vie profonde hors de l’Église, pas plus pour le pays que pour l’individu, s’appuie sur l’autorité de l’auteur de Gallica : « c’est le cri touchant d’un noble poète, de ce Frédéric Plessis dont le nom mériterait de survivre, quand il n’aurait écrit que ces vers :


Pareil à l’arbrisseau qui se sèche et s’incline
Transplanté d’une serre à l’autre sans succès,
J’ai retrouvé ma force en reprenant racine
Grâce à toi, dans le sol catholique et français[2].



CHAPITRE V
L’influence actuelle du Parnasse

Les influences littéraires ne sont pas soumises aux mêmes lois rigides que les influences physiques : elles ont quelque chose de capricieux et de déconcertant, parce que, entre chaque génération nouvelle, qui change, et les œuvres qui demeurent, il se fait une accommodation ou un antagonisme. On peut s’en rendre compte

  1. La Muse Française du 10 mai 1924.
  2. Au Service de l’Ordre, p. 258 ; Plessis, Poésies complètes, p. 371.