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CONCLUSION

caverne qui sert d’atelier à Vulcain : « elle est toute revêtue de plaques en cuivre rouge, retenues par des clous de fer brillant. Au fond, on aperçoit, rutilant comme une mer, les métaux en fusion. Par moments de grandes flammes rouges font étinceler des colonnes d’or rouge aux chapiteaux de rubis… Le long des murs, des statues, des trépieds, des boucliers, des bijoux attachés aux colonnes. Sur des coffrets, et par terre, des fouillis d’escarboucles et de pierres précieuses[1] ». L’ensemble de l’Exposition parnassienne est éblouissant et rigide. Les visiteurs qui aiment la couleur et la ligne sont enchantés. Les bourgeois qui préfèrent la peinture sentimentale ou les types gracieux, sont déçus, n’osent l’avouer, et s’éclipsent. Aussi n’y a-t-il jamais foule, mais les connaisseurs sont ravis.

Il est difficile d’imaginer qu’on puisse jamais approcher de la perfection plus près que Leconte de Lisle et Heredia. Aussi, est-on surpris en lisant dans Catulle Mendès que la valeur du Parnasse est surtout dans son avenir : « nous avons été, nous sommes les escarmouches de la future victoire. Grâce à nous, qui avons définitivement vaincu les élégiaques et les débraillés, ennemis du rythme et de la langue, les pleurards imbéciles et les cyniques rieurs, enfants dégénérés du grand Lamartine et de l’admirable Musset, — grâce à nous qui avons proclamé et démontré la nécessité de ne pas compter sur l’inspiration seule, de l’exalter par le travail, et de l’épurer par la soumission aux règles sacrées, — grâce à nous les poètes nouveaux pourront se développer sans entraves. Nous avons préparé la besogne, ils l’achèveront[2] ». Chose bizarre, cette idée fausse a plu à l’esprit le plus ratiocinant de toute la critique : Brunetière adopte le rêve de Mendès ; il souhaite qu’il vienne un jour un poète dépassant les Parnassiens sur leur propre voie, et les glorifiant de sa gloire[3]. Soyons plus prudents, écartons les chimères, et tenons-nous en à l’art qu’ils ont réalisé : il a sa grandeur, une beauté secrète, cachée à beaucoup d’esprits, et qui n’apparaît qu’aux artistes généreux ; Barrès est peut-être celui qui l’a le mieux

  1. Le Forgeron, p. 286.
  2. La Légende du Parnasse, p. 303.
  3. Histoire et Littérature, II, 233.