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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/207

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sophie kovalewsky.

lever, pour aller au tableau montrer en quoi l’erreur consistait.

« Notre heureuse vie à trois, si riche d’intérêts de tout genre, car Kovalewsky ne bornait pas sa curiosité aux questions d’ordre scientifique, ne devait pas durer. Dès le commencement de l’hiver nous vîmes arriver la sœur de Sophie, et son amie Inès, toutes deux plus âgées que nous de quelques années. Kovalewsky nous voyant un peu à l’étroit dans notre appartement, se décida à nous quitter pour se loger ailleurs. Sophie allait le voir souvent, passait des journées entières chez lui, et faisait seule avec lui de longues promenades. Voldemar se sentait mal à l’aise dans la société des autres dames, d’autant plus que les nouvelles venues se montraient souvent peu aimables. Elles trouvaient mauvais, le mariage étant fictif, que Kovalewsky donnât un caractère d’intimité à ses relations avec Sophie ; leur ingérence occasionna des ennuis qui troublèrent les bons rapports de notre petit cercle.

« Au bout du semestre, Kovalewsky prit le parti de quitter Heidelberg, pour Iéna d’abord, puis pour Munich, où il vécut exclusivement plongé dans ses études. Très doué, très laborieux, modeste dans ses goûts, il n’avait aucun besoin de distraction. Sophie prétendait qu’un livre et un verre de thé suffisaient pour le rendre parfaitement heureux ; au fond elle en était froissée, et devenait jalouse de ces études qui remplaçaient si bien sa société. Nous allâmes voir Kovalewsky plusieurs fois ; ils firent ensemble