Aller au contenu

Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/209

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
192
sophie kovalewsky.

l’atteignait toujours, sauf dans les questions de sentiment, où, chose étrange, elle perdait la clarté de son jugement. Trop exigeante en affection, il semblait qu’elle voulût prendre de force ce qu’on lui aurait volontiers accordé, si elle n’y eût pas mis autant de passion. Avec un extrême besoin de tendresse et de confiance, elle rendait toute intimité impossible. Trop agitée, trop peu pondérée, elle aspirait sans cesse à l’intimité, et ne pouvait s’en contenter longtemps. Jamais d’ailleurs elle ne tenait compte de l’individualité d’autrui. Kovalewsky de son côté, toujours préoccupé de nouveaux plans et de nouvelles idées, avait une nature inquiète et tourmentée ; je doute que ces deux êtres, si richement doués, eussent jamais pu rencontrer le bonheur, dans quelque condition qu’ils se fussent trouvés. »

Sophie passa deux semestres à Heidelberg, jusqu’à l’automne de 1870 ; elle se rendit de là à Berlin, pour y continuer ses études sous la direction du professeur Weierstrass. Pendant ce temps, Voldemar avait obtenu le doctorat à léna ; sa thèse y attira l’attention générale et le fit connaître comme un travailleur sérieux.