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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/254

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arrivée à stockholm.

scientifiques sont-ils principalement le développement des idées de son illustre maître, et c’est aussi pourquoi elle éprouvait l’absolue nécessité d’un continuel échange d’idées, avec ceux qui pouvaient prendre part à ses travaux littéraires. La vie d’une petite ville telle que Stockholm devait nécessairement paraître stagnante à une intelligence comme la sienne ; une des grandes capitales de l’Europe pouvait seule lui fournir le mouvement intellectuel dont elle avait besoin.

Elle passa à Berlin les fêtes de Noël 1884 ; c’est en revenant de là qu’elle dit ce mot, si blessant pour ses amis, et qu’elle répétait toujours en rentrant en Suède : « La plus belle ligne de chemin de fer que je connaisse est celle de Stockholm à Malmö, et la plus laide, la plus ennuyeuse, la plus fatigante, est celle de Malmö à Stockholm »,

Mon cœur se serre à la pensée de tous ces voyages qu’elle fit avec une amertume croissante, jusqu’au dernier, qui précéda de si peu sa mort prématurée. Une lettre à mon frère, adressée de Berlin, témoigne déjà d’un retour à la mélancolie, et cependant ses amis assurent ne l’avoir jamais vue plus remplie d’entrain que pendant ce séjour. Pour réparer le temps perdu dans sa première jeunesse, elle prétendit apprendre à danser et à patiner ; mais pour ne pas faire ses débuts en public, elle s’exerça dans le jardin d’un de ses amis et admirateurs, qui organisa aussi pour elle des leçons de danse particulières, avec quelques admirateurs pour cavaliers. Elle passait