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PHILOSOPHIE DE LA NATURE

agitait là-dedans formaient, d’après le même auteur, « la mixture la plus étrange » de concepts scientifiques et de rêveries mystiques. « De jeunes hommes, que rebutaient la discipline rigoureuse d’un enseignement philosophique comme aussi toute activité scientifique méthodique, s’accommodaient à merveille de ces jeux d’esprit, qui leur procuraient, sans beaucoup de peine, des idées en grand nombre. »[1] Ce sont ceux, dit Steffens, qui plus tard se firent les lecteurs les plus assidus des écrits de Novalis. Vraisemblablement c’est aux mêmes agitations, plus ou moins occultes, que fait allusion Schubert, disciple et ami de Ritter (dont il adopta plus tard la fille) lorsqu’il parle d’un groupe de naturalistes mystiques, qui se réunissaient dans les environs d’Iéna, (Ritter habitait une maison de campagne à Belvédère), et où on pratiquait le magnétisme animal, la télépathie, la communication de la pensée, etc. « La plupart de ces phénomènes », ajoute-t-il, « se produisaient dans des moments d’exaltation religieuse ou avaient coutume d’affecter ce caractère. »[2] Solger, qui fut en 1801 un des auditeurs assidus de Schelling à Iéna, observait les mêmes symptômes parmi la jeunesse de son temps. Le diagnostic qu’il établit de ce naturalisme néo-mystique, s’il ne s’applique pas exclusivement au groupe des physiciens religieux qui entouraient Ritter, définit cependant très nettement, quoique d’un point de vue hostile, toutes les tendances similaires. Il s’agissait, dit-il « de transposer les lois et les activités de la nature dans l’ordre spirituel et moral et de fonder ainsi la morale sur la physique. Cette illusion dangereuse, qui ne mène qu’aux aberrations de la magie et qui fausse la connaissance de la nature pour l’employer à des fins de ce genre, est un symp-

  1. Steffens. Was ich erlebte. op. cit. T. 4, pp. 90-91. Sur la méthode de Ritter on peut lire un article, rédigé sans doute par un de ses disciples, dans l’« Allgemeine literarische Zeitung » de Halle, Année 1805, 25 novembre. Pour les renseignements biographiques, voir Schubert (Gott, Heinrich von) Selbstbiographie, Erlangen, 1855. Tome 2, pp. 386 et suiv.
  2. Schubert, Ansichten von der Nachtseite der Naturwissenschaft. — 1808. — pp. 339 et p. 353.