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Page:Spenlé - Novalis.djvu/214

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NOVALIS

animer la nature entière comme son propre corps. » La vérification expérimentale île cette âme cosmique Ritter avait cru la découvrir dans les phénomènes du galvanisme. « Chaque partie du corps », disait-il, « si simple qu’elle paraisse, doit être envisagée comme un système de chaînes innombrables et infiniment petites, car on peut la diviser à l’infini et on retrouvera cependant toujours des parties analogues au tout. De pareils systèmes entrent à leur tour comme éléments dans des chaînes plus hautes, celles-ci de nouveau dans d’autres chaînes plus étendues et ainsi de suite jusqu’à la plus grande chaîne, qui comprend toutes les autres. Ainsi sans cesse les parties refluent vers le tout et le tout reflue vers les parties. »[1]

Il y a ainsi une sorte de circuit cosmique, une ondulation universelle de la vie. Les organismes individuels ne sont que des points d’arrêt qui interrompent le courant pour l’intensifier. Ce que l’individu, comme tel, possède de vitalité il l’arrache à la vie universelle et il faut qu’un travail continu d’assimilation et de désassimilation, — dont les tenues extrêmes sont la naissance et la mort. — rétablisse sans cesse le circuit interrompu et draîne le courant. La physique se transforme ainsi en une biologie cosmique. Les différents règnes ne doivent pas être étudiés isolément, mais comme les éléments ou les organes de l’Animal-Univers. « Les corps célestes ». disait Ritter en concluant, « en sont les corpuscules sanguins ; les voies lactées sont les muscles et un éther céleste pénètre partout comme un fluide nerveux… Où trouver encore ce qui distingue les parties de l’animal, de celles de la plante, du métal ou de la pierre ? Ne sont-ce pas là toujours les parties du grand Animal-Univers (des grossen All-Thieres) ? — Une loi de la nature inconnue et universelle semble briller tout à coup devant nos yeux. »[2]

On reconnaît ici ce démiurge de la Nature, dont Novalis disait qu’il « nous mange, nous enfante, nous parle, nous

  1. Ritter, Beweis dass ein bestændiger Galvanismus, den Lebnsprozess in dem Thierreich begleitet, Weimar, 1798, p. 158.
  2. I. W. Ritter. Beweis etc. op. cit., p. 171.