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Page:Spenlé - Novalis.djvu/215

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PHILOSOPHIE DE LA NATURE

élève, se laisse manger, engendrer et enfanter par nous ». La loi profonde de la création, c’est un communisme mystique. « La Nature ne tolère pas les droits de propriété imprescriptibles. Elle définit d’après des règles immuables tous les vestiges de la propriété, elle extirpe tous les vestiges de l’organisation. La terre appartient à toutes les générations. Chacune élève ses prétentions sur l’ensemble. Les aînées ne tirent aucun bénéfice du hasard de la primogéniture. Le droit de propriété se trouve périmé à dates fixes. »[1] Telle est, selon l’expression de Novalis, la « politique » de la nature. Le galvanisme en est l’indice révélateur et la vérification scientifique. « Si le galvanisme exalte toutes les fonctions des éléments individuels, c’est qu’il n’est peut-être pas autre chose qu’une conscience supérieure de la Nature, l’âme de la Nature… Les corps, semble-t-il, doivent commencer par apprendre à se sentir les uns les autres par le moyen du galvanisme, avant de pouvoir agir les uns sur les autres. »[2]

Mais le galvanisme ne nous révèle encore l’âme cosmique que dans ses manifestations inférieures. Il faudrait que celle-ci se manifestât comme un « sens interne » de l’univers, c’est-à-dire comme une activité animique. Précisément dans la seconde moitié du 18me siècle le fameux magnétiseur Mesmer prétendait avoir découvert dans ce qu’il appelait le « magnétisme animal » cet agent universel, à la fois fluidique et psychique. Exalté par les uns, nié de parti-pris par les autres, le magnétisme animal devint, en Allemagne comme en France, un sujet d’actualité passionnante. Tandis que les revues rationalistes, telles que le « Mercure Allemand » et la « Berlinische Monatsschrift » prenaient résolument parti contre l’interprétation aventureuse des phénomènes, ou même contestaient l’authenticité des expériences, tandis que le libraire Nicolaï, directeur et éditeur de l’« Allgemeine deutsche Bibliothek », flairait dans tout magnétiseur

  1. N. S. II, 1, p. 3.
  2. N. S. II, 1, pp. 266 et 267.