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Page:Spenlé - Novalis.djvu/225

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PHILOSOPHIE DE LA NATURE

morales, ses stimulants moraux. »[1] Il s’agit donc de trouver un genre littéraire qui nous permette d’étendre jusqu’à elle le lien religieux et moral de la sociabilité humaine, un genre où apparaisse non plus son corps inanimé, mais son « histoire » et son âme secrètement vivante, où les forces et les éléments eux-mêmes soient présentés comme les personnages d’un drame humain. Ce genre essentiellement romantique, c’est le « Mærchen » qui le réalise le plus parfaitement.

LE CONTE CABALISTIQUE DE KLINGSOHR
LA THÉORIE DU « MÆRCHEN »


Dans la légende du Tournoi poétique de la Wartburg c’était un personnage fort énigmatique que le magicien Klingsohr de Hongrie, poète et nécroman. Il avait été initié, d’après la légende, aux sciences occultes à Bagdad, à Constantinople, à Naples où Virgile lui-même lui était apparu, à Paris enfin, sous les auspices de l’illustre Merlin. Pendant trois ans il avait vécu près de Mahomet. Il possédait toute la science du Moyen-âge et il la proposait sous forme d’énigmes indéchiffrables à son rival et adversaire poétique, Wolfram d’Eschenbach. Les circonstances où, dans le roman Henri d’Ofterdingen, le Klingsohr de Novalis, au soir des fiançailles de la gracieuse Mathilde et du jeune poète Henri d’Ofterdingen, raconte son « Mærchen », sont assurément moins merveilleuses et moins dramatiques. Le personnage non plus, — où on reconnaît les traits nobles et souriants de l’olympien Gœthe, — n’a rien de la farouche grandeur de son homonyme médiéval. Cependant l’énigme qu’il propose aux hôtes rassemblés en si joyeuse aventure, ne laisse d’être à première vue fort obscure et, si on en juge par une première lecture, dut paraître médiocrement récréative. Essayons modestement de sou-

  1. N. S. II, 1, p. 265, II, 2, pp. 525 et 495.