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Page:Spenlé - Novalis.djvu/247

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PHILOSOPHIE DE LA NATURE

singulier pour notre temps et qui n’est pas à l’avantage de Schelling, de voir comme les idées de ce dernier sont si vite fanées et démodées. En ces derniers temps seulement ont pu paraître des livres aussi éphémères. »[1] Est-ce là le langage d’un disciple ? De son côté Schelling se sentait peu de sympathie pour la partie masculine du groupe romantique, pour Novalis en particulier. Il trouvait en celui-ci un dilettantisme scientifique insupportable. « Je ne puis me faire à cette frivolité intellectuelle qui consiste à flairer tous les objets, sans en pénétrer aucun. »[2] Steffens, l’écho fidèle de Schelling, porte à peu près le même jugement, — jugement qui contraste singulièrement avec celui qu’il formulera plus tard, lorsque Schelling et les « schellingiens » auront définitivement évolué vers la théosophie. « C’est un homme de beaucoup d’esprit », dit-il, « mais il m’a confirmé dans l’idée que même les hommes d’esprit de nos jours ont peu de compréhension pour une méthode rigoureuse et scientifique… Sa manière de penser me semble aboutir à cette forme d’esprit incohérente, qui cherche à surprendre la nature par des traits d’esprit et qui finit par amalgamer pêle-mêle ces boutades et ces saillies, — bref, du « schlegelianisme » en matière de sciences naturelles. »[3] On se rappelle ce qu’il disait du petit groupe de naturalistes mystiques, dont Ritter était l’âme, et où se préparait une opposition sourde contre la philosophie de la nature de Schelling.

Sans doute les termes de comparaison sont nombreux entre Novalis et Schelling : chez les deux on trouve la même conception d’un organisme universel, un parallélisme continu entre le monde physique et le monde des Idées, qui se symbolisent mutuellement, la même méthode idéaliste qui veut, à l’inverse des méthodes scientifiques matérialistes, interpréter les phénomènes inférieurs par les supérieurs, les plus simples par les plus complexes. Enfin, ils concevaient

  1. Raich, op. cit., p. 77.
  2. Plitt, Aus Schelling’s Leben, 1864, I, pp. 431-432.
  3. Plitt, op. cit. I, p. 277.