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Page:Spenlé - Novalis.djvu/274

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NOVALIS

trouve ne ressemble à rien, si ce n’est aux premières poésies de Gœthe… L’ironie dans tout cela c’est que Tieck, qui ne réussit pas à tirer de son propre fond une seule de ces petites pièces, en dépit de toutes les pirouettes qu’il exécute dans son for intérieur, s’est mis en tête de composer des cantiques chrétiens. Ils y joindront des sermons et les feront imprimer. Hardenberg pense te dédier le tout. »[1] Dès le mois de janvier 1800 Novalis envoyait sept de ces poésies à Frédéric Schlegel. Cependant la série complète qui, avec les hymnes à Marie, comprend quinze pièces, ne parut pas dans l’Athenæum, mais seulement dans l’Almanach des Muses pour l’année 1802.

On peut distinguer dans les hymnes spirituelles trois groupes : les hymnes à Jésus, — les hymnes à Marie, — et les hymnes théosophiques.

La qualité religieuse des hymnes à Jésus c’est un piétisme morave poétisé. Le principe de la foi se trouve ramené non à l’autorité de l’Église, ni à une croyance dogmatique, mais à une expérience psychologique individuelle. « Que serais-je devenu sans toi ? Que serais-je encore sans toi ? » Les éléments historiques de la vie du Christ se trouvent ainsi étroitement mêlés à la confession personnelle de l’âme religieuse. Mais c’est surtout dans la théologie de Zinzendorf qu’il faut rechercher les grands motifs, qui ont inspiré les hymnes à Jésus de Novalis. Ce qui caractérise le christianisme du grand réformateur de Herrnhout, c’est d’abord un attachement purement sentimental à la personne même de Jésus. Lui-même raconte qu’à l’âge de huit ans, dans une nuit, d’insomnie fiévreuse, il avait vu se dérouler devant sa conscience les arguments les plus raffinés de l’incrédulité. « Mais parce que j’éprouvais pour le Sauveur un attachement tendre et loyal, les arguments de la pensée raisonnante n’eurent d’autre effet que de troubler mon sommeil. Seul l’objet de ma croyance répondait à mon désir ; quant à mes pensées, elles me furent odieuses, et je pris dès lors la

  1. Aus Schleirmacher’s Leben, op. cit., III, p. 134.