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Page:Spenlé - Novalis.djvu/291

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LA RELIGION NATURISTE

dable de la vie, aux innombrables métamorphoses. C’en fut fait de la foi créatrice… »[1] Les dieux rentrèrent dans le chaos primitif. Mais la mort n’était qu’apparente : l’ancien élément religieux reparut sous une forme rajeunie dans le christianisme.

Une palingénésie analogue fait l’objet de la dissertation intitulée « Europa ». Le christianisme à son tour a eu sa période organisatrice : ce fut le catholicisme médiéval. Mais celui-ci non plus n’a pu échapper à la destinée universelle, qui veut que sans cesse les formes anciennes se dissolvent pour faire place à des organisations nouvelles. Le rationalisme moderne — le protestantisme d’abord, la philosophie des « lumières » ensuite, et finalement la Révolution française — tels sont les dissolvants qui ont amené une nouvelle période d’anarchie. Est-ce à dire qu’il faille relourner purement et simplement au catholicisme romain ? Nullement, et c’est ici que la coupure de Frédéric Schlegel paraît particulièrement opportune, puisqu’elle défigure entièrement la pensée véritable de l’auteur. Le catholicisme a été faussé dans sa vie intime, par cela même qu’il est devenu une confession particulière parmi les autres. On pourrait lui appliquer le mot de Joseph de Maistre au sujet de la monarchie de droit divin et dire de lui qu’il était « un miracle ». Il ne se maintenait que par la foi à sa mission miraculeuse et à son inviolable unité. Du jour où il était contesté, il était perdu : le schisme a pour toujours anéanti son caractère surnaturel. « Sa forme contingente », ainsi concluait l’auteur, « est à peu près détruite : l’antique papauté est descendue au tombeau et pour la seconde fois Rome s’est changée en ruines. Le protestantisme ne doit-il pas lui aussi disparaître, pour faire place à une Église nouvelle et plus durable ? »[2]

C’était, avons-nous vu, une des idées favorites de toutes les sectes mystiques, que l’annonciation de cette Église nou-

  1. N. S. I, p. 317.
  2. N. S. II, 2, p. 419.