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Page:Spenlé - Novalis.djvu/296

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NOVALIS

C’est sans doute un essai dans ce genre qu’aurait apporté la suite projetée du Disciple à Saïs, si on en juge par la courte esquisse que l’auteur en a tracée. Après la mort du Maître à l’arrivée de toutes les divinités, devait apparaître, sous les traits d’un Enfant symbolique, le nouveau « Messie de la Nature ». C’est lui que célèbre une des hymnes théosophiques. l’hymne XI, qu’on pourrait intituler l’hymne de la Pentecôte panthéistique.[1] poète y décrit symboliquement le rajeunissement de la nature sous les effluves divins. « Il est l’étoile ; Il est le soleil, la source de la vie éternelle : dans les plantes et dans les pierres, dans la mer et dans la lumière transparaît son visage enfantin… Un Dieu pour nous, un Enfant pour lui-même, Il nous aime tous d’un amour profond ; Il se fait notre aliment et notre breuvage… » La même pensée naturiste-mystique se retrouve également dans la dissertation religieuse « Europa », où l’auteur annonce prophétiquement un nouveau Messie, qui, « habitant au milieu des hommes comme un génie invisible, affirmé lar la foi sans pouvoir être perçu par les sens, se manifestera aux cioyants en d’innombrables métamorphoses, dans le pain et dans le vin dont ils se nourrissent, dans la Bien-aimée qu’ils étreignent, dans l’air qu’ils respirent, dans les sons et les paroles qui frappent leurs oreilles et qu’ils sentiront enfin, au milieu des angoisses suprêmes de l’amour, dans l’extase divine de la mort, pénétrer jusqu’au plus profond de leur chair consumée. »[2]

La religion naturiste sera essentiellement individuelle et poétique. Et tout d’abord ce sera une religion sans dogmes. Car le dogme est un élément intellectuel qui, en voulant leur imposer une forme immuable, paralyse et appauvrit les facultés sensitives, comprime les activités inventives de l’imagination religieuse. Rien n’est, à cet égard, plus éloigné de la pensée de Novalis que le traditionnalisme catholique. Ce qu’il reproche au protestantisme c’est précisément d’ê-

  1. N. S. I, p. 340-341.
  2. N. S. II, 2, p. 414.