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Page:Spenlé - Novalis.djvu/418

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

trouvaient développés tout au long dans une étude de Heine sur l’École romantique allemande, parue d’abord en français, sous formes d’articles dans l’« Europe littéraire », en 1833, et ajoutée ensuite comme seconde partie à une étude plus complète « sur l’Allemagne », sur sa vie religieuse, philosophique et littéraire. Dans la grande opposition que Heine établit là entre l’art classique et l’art romantique chrétien on reconnaît sans peine les définitions de Hegel, mais exprimées dans un style de feuilleton, qui vise à l’effet plus qu’à la précision et qui recherche les contrastes à tout prix. Les pages, très amusantes à lire du reste, qu’il consacre à Novalis n’ont pas beaucoup enrichi la critique littéraire. La documentation de l’auteur est en effet des plus fantaisistes. Les quelques renseignements biographiques qu’il fournit sont faux (« Il aima une jeune dame qui mourut de la phtisie »). Des œuvres du poète il cite tout juste la première page de Henri d’Ofterdingen. Il ne semble pas du reste avoir lu l’ouvrage complet (il appelle en effet l’héroïne du roman « Sophia »). Quant au portrait de Novalis il est certainement inspiré de Hegel. Celui-ci avait déjà cru découvrir chez le jeune poète les symptômes d’une « consomption de l’esprit » — par où il entendait, comme on a vu, une maladie toute philosophique. Heine reprend cette interprétation pathologique, mais en lui prêtant un sens plus réaliste, plus physiologique. On connaît la petite nouvelle qu’il raconte à ce propos, — l’histoire de la jeune fille anémique, au teint diaphane et aux yeux langoureux, la sœur d’une receveuse des postes des environs de Gœttingen, — qui, à force de lire Novalis finit par contracter la maladie du poète et s’éteint doucement, en même temps que l’automne se dépouille de ses dernières feuilles. La phtisie, — ainsi s’appelle la muse de Novalis. Heine rapproche, à cet égard, le jeune poète de Hoffmann. « La grande ressemblance entre les deux auteurs consiste en ce que leur poésie était à vrai dire une maladie. À cet égard on a remarqué que l’appréciation de leurs œuvres est moins l’affaire du critique que du médecin. Le