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Page:Spenlé - Novalis.djvu/432

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

des frères Schlegel, de Schelling et de Novalis. Tout d’abord ces publications permirent d’apercevoir, derrière les œuvres, les hommes et les femmes du romantisme, tels qu’ils furent dans la réalité, et non tels que les avait défigurés la légende ou la polémique. De plus on aperçut nettement ce qu’avait déjà pressenti Hettner — que leurs préoccupations et leurs intentions avaient été bien différentes de celles qu’on leur avait prêtées et qu’à quelques années d’intervalle les mêmes mots ne signifiaient déjà plus les mêmes choses. On put voir alors qu’ignorant encore complètement toutes les formules de parti qui devaient bientôt après passionner l’opinion publique en Europe et s’entre-choquer dans une lutte acharnée, et du reste profondément dédaigneux des réalités positives et matérielles, ils n’avaient poursuivi réellement qu’un intérêt de culture générale et par là se rattachaient malgré tout à la grande tradition humaniste. « Tous ces jeunes novateurs — écrit M. Haym — se sont préoccupés non pas de poésie seulement, mais d’une culture générale nouvelle, dont la poésie constituait à leurs yeux le noyau seulement : c’est ce qui ressort nettement de toutes leurs affirmations, et la tendance universelle, encyclopédique, de leur idéalisme s’affirme si clairement que même l’ancienne critique, avec ses conceptions étroites, se voyait obligée de quitter le domaine de l’histoire littéraire proprement dite, pour faire sans cesse des incursions dans les avenues voisines de la spéculation philosophique, de la vie religieuse et morale… Les Allemands aussi ont eu leur Révolution. L’histoire de l’école romantique c’est l’histoire d’une révolution dans la littérature ; telle fut la véritable pensée qui animait cette génération et c’est par là qu’elle continue à agir aujourd’hui. » (Haym. op. cit. p. 7 et p. 14).

« Une tradition historique commune à tous les esprits cultivés n’a nas encore pu se constituer et se développer dans notre peuple à peine unifié », écrivait Treitschke dans l’Avant-propos de son Histoire de l’Allemagne au 19me siècle.