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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/202

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Formés généralement d’aloès, de gommiers, d’acacias de toute espèce, tellement serrés que leurs branches s’entrelacent, ces îlots de broussailles, plus communs dans l’Oukouéré que dans toute autre province, opposent des obstacles insurmontables à un ennemi sans vêtement. Il n’est pas de voleur, pas d’assaillant assez hardi pour affronter ces formidables épines, qui se présentent de toute part.

Quelques-uns de ces halliers servent de repaire à des groupes de bandits qui manquent rarement de saisir les gens esseulés, traînards de caravanes et autres, surtout si c’est un Mgouana, ainsi que nous l’avons vu au sujet de Khamisi.

J’estime la population de l’Oukouéré à cinq mille âmes, répartis dans une centaine de villages, sur un terrain qui, borné au sud par le Roufou, au nord par le Vouami, n’a pas plus de trente milles carrés. S’ils étaient réunis sous les ordres d’un seul chef, les Vouakouéré pourraient devenir une tribu puissante.

Viennent ensuite les Vouakami, débris d’une nation qui jadis occupa tout le territoire qui s’étend de l’Oungérengéri à la Grande-Makata. Des guerres fréquentes avec les Vouaségouhba et les Vouadoé les ont réduits à une langue de terre d’une largeur de dix milles, placée entre le pic de Kira et l’arête rocailleuse qui ferme la vallée du côté de l’est, à deux milles environ du bord de la rivière.

Ils sont là, pressés comme des abeilles, retenus par la fertilité du sol, qui, en prévenant leur dispersion, a conservé à la tribu son existence. De la crête rocheuse qui domine la vallée, on voit avec la lorgnette des groupes de cases aux tons bruns, enfouis dans les massifs de verdure, et l’on compte aisément plus de cent villages.

En sortant de l’Oukami, nous entrons dans l’Oudoé, où nous trouvons un beau peuple, à l’air martial, aux traits bien plus intelligents que ceux des Vouakouéré et des Vouakami, et d’une teinte plus claire que celle des tribus précédentes ; un peuple qui a des traditions de race, qui, en voyant l’ennemi empiéter sur ses domaines, a couru aux armes, et qui s’est vaillamment défendu[1].

Le pays n’est pas moins remarquable. Parmi les provinces que traverse la route que nous avons prise, il en est peu d’aussi riches

  1. Voir dans Burton (Voyage aux grands lacs), page 112, l’histoire de cette lutte acharnée. (Note du traducteur.)