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Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/227

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pensées

de manière à avoir le plus grand degré possible de désir de les connaître, supposons encore que cet homme ait été passionné de cette manière depuis sa plus tendre enfance jusqu’à 27 ans, que tout à coup à cet âge il se lie par des vœux volontaires et éternels à la Grande-Chartreuse. Je dis que même là, séparé par sa propre volonté pour toujours du monde, il écoutera encore des nouvelles avec un vif plaisir. Cependant par la supposition ces nouvelles lui sont parfaitement inutiles, force de l’habitude sur une passion.

Haïr est une peine, quand nous la prenons nous voulons l’échanger contre du plaisir.

Dans nos mœurs actuelles quel est le taux de cet échange au théâtre ? On a sifflé dernièrement dans le pauvre Garçon malade un voleur qui s’introduisait devant le public dans sa chambre et qui venait lui voler une boëte.

Quelle différence le public met-il à la scène entre l’odieux qu’il doit punir et l’odieux que doivent punir les lois ?

Cléopâtre de Rodogune est bien plus odieuse que Narcisse de Britannicus, cependant on murmure en entendant Narcisse, on est prêt à le siffler ; Cléopâtre n’excite point ces mouvements de l’âme.

Tartufe ne paraît qu’au troisième acte.