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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/139

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À l’exception des deux grands poëtes que j’ai cités, tous les Allemands ne doivent leur célébrité douteuse qu’à l’obscurité de leurs écrits. Il est aussi difficile de trouver un Italien qui ne soit pas verbeux qu’un Allemand qui soit clair. Ils ne veulent pas comprendre qu’avant d’avoir des chefs-d’œuvre littéraires, il faut avoir de belles mœurs ; or, on peut voir les mémoires de madame la margrave de Bayreuth, la sœur du grand Frédéric. Ce qu’il y a de pis pour les beaux-arts dans les barbares[1] que décrit cette princesse, c’est qu’ils manquent de naturel ; aussi manquent-ils de belle prose, et c’est la prose qui est le thermomètre des progrès littéraires d’un peuple. La Guerre de Trente-Ans de Schiller est d’une emphase ridicule ; il y a loin de là à Hume et à Voltaire.

20 juin. — Je me sépare enfin de mes chers Padouans, les larmes aux yeux. Je promets de revenir à la fête du Santo, au mois d’août ; alors la population est doublée. Quant à mes Anglais, ils sont établis à Venise depuis quinze jours ; ils ont déclaré que Padoue était le plus triste trou de l’univers. Ils ont raison,

  1. Voir le Mercure du Rhin.