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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/80

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baptisée à Francfort, selon le rite protestant : j’eus pour marraine la vieille dame, pour parrains mes deux oncles maternels : Moritz von Bethmann et Bethmann-Hollweg. Aussi longtemps que nous demeurâmes en Allemagne, il n’y eut pas lieu à délibérer sur la chose entendue. Mais lorsqu’on fut rentré en France, ma grand’mère paternelle, soucieuse des avantages de la famille, fit observer à son fils qu’il ne serait pas utile pour moi d’être instruite selon Luther dans un pays où tout le monde l’était selon Bossuet, et que d’aller au prêche quand nos princes allaient à la messe n’était pas chose bien avisée. Le fond même de la question, la vérité des dogmes, l’avancement de ma vie spirituelle, le salut de mon âme, la touchaient en ceci médiocrement, mais seulement les bienséances. Ma grand-mère était, comme on l’est généralement en France, très-conformiste. Faire comme tout le monde, c’était à ses yeux, bien faire ; être comme tout le monde, c’était être sage et respectable. J’étais appelée à vivre et à m’établirdans une société catholique, disait-elle : pourquoi m’y ranger à l’avance dans l’exception, et dans l’exception défavorable ? Combien le choix de mes parents, quand il faudrait me donner un mari, n’en serait-il pas restreint ! À quels embarras on s’exposerait en me laissant protestante ! L’argument parut sans réplique à mon père ; ma mère s’y rendit ; dans un de ses voyages à Paris, l’oncle dit : « Qu’à cela ne