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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/163

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« — Je voudrois, dit mon oncle Tobie avec un profond soupir, — je voudrois, Trim, être déjà à demain. »

« En vérité repliqua le caporal, monsieur s’afflige trop. — Monsieur veut-il que je lui verse un verre de vin sec, qu’il boira en fumant sa pipe ? — À la bonne heure, Trim, dit mon oncle Tobie. »

« Je me rappelle très-bien, dit mon oncle Tobie en soupirant encore, l’histoire de l’enseigne et de sa femme. Il y a même une circonstance qui est en sa faveur, et que sa modestie a passée sous silence. — C’est qu’ils furent plaints l’un et l’autre par tout le régiment et par toute l’armée. — Mais achève ton histoire, caporal. — Elle est achevée, dit le caporal. — Je n’ai pas voulu rester plus long-temps ; j’ai souhaité une bonne nuit au pauvre lieutenant : son fils s’est levé de dessus le lit, et m’a éclairé jusqu’au bas de l’escalier ; et comme nous descendions ensemble, il m’a dit qu’ils venoient d’Irlande, et qu’ils étoient en route pour réjoindre le régiment en Flandre. — Mais hélas ! dit le caporal, tous les voyages du lieutenant sont finis. — Et que deviendra son pauvre enfant, s’écria mon oncle Tobie ? »