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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/104

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occupations dans le monde que celle de tâter le pouls d’une femme… Oui… mais d’une grisette ! répliquerois-tu… et dans une boutique toute ouverte ! Ah, Yorick !

Eh ! tant mieux. Quand mes vues sont honnêtes, je me mets peu en peine que le monde me voie dans cette occupation.


LE MARI.
Paris.


J’avois compté vingt battemens de pouls, et je voulois aller jusqu’à quarante, quand son mari parut à l’improviste et dérangea mon calcul. C’est mon mari, dit-elle, et cela ne fait rien. Je recommençai donc à compter. Monsieur est si complaisant, ajouta-t-elle lorsqu’il passa près de nous, que de prendre la peine de me tâter le pouls. Le mari ôta son chapeau, me salua, et me dit que je lui faisois trop d’honneur. Il remit aussitôt son chapeau, et s’en alla.

Bon Dieu ! m’écriai-je en moi-même, est-il possible que ce soit-là son mari !

Une foule de gens savent, sans doute, ce qui pouvoit m’autoriser à faire cette exclamation ; qu’ils ne se fâchent pas si je vais l’expliquer à ceux qui l’ignorent.