Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/640

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prendre à la gorge, — et je vous en parlai beaucoup. — Enfin, il plut au ciel que ce moment ne fût pas le dernier de ma vie, quoique ce fût bien en conscience que je prophétisasse ma fin lorsque je disois que je ne comptois pas passer l’hiver. — Je crois, mon cher ami, vous dis-je, que bientôt je ne serai plus. — Je ne le crois pas, répondîtes-vous en me serrant la main, et poussant un soupir qui partant de votre cœur, vint droit au mien ; — cependant — craignant que la chose ne fût que trop vraie, vous eûtes la bonté d’ajouter : j’espère que vous me permettrez d’être toujours avec vous, afin que je ne perde pas une minute de l’avantage consolant de votre société, tant que le ciel me permet d’en jouir. —

Je ne fis aucune réponse ; je ne le pouvois pas : — mais mon cœur en fit une alors, et il continuera de la faire jusqu’à ce qu’il soit une motte de terre de la vallée.

Voilà d’où je tire la certitude que vous quitterez sans regret le tourbillon du plaisir, pour venir vous asseoir sous mon chèvrefeuille qui se pavane actuellement comme une nymphe du Renelagh, et pour m’accompagner chez mes nones, à qui je fais la pension d’une visite tous les soirs. — Nous