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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/213

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pité dans la rapide et profonde rivière, aux acclamations frénétiques des Jacques.

— Ainsi périssent nos seigneurs, noyés, brûlés, massacrés ! Ils ont fait noyer, brûler, massacrer, nos frères ! — s’écrie d’une voix tonnante Guillaume Caillet debout sur le pont, ayant à ses côtés Mazurec et Mahiet-l’Avocat.

— À mort, nos seigneurs ! — répètent les Jacques d’une seule voix. — Que pas un n’échappe !

— Femmes, enfants… massacrons tout !

— Pas de pitié pour eux !

— Ils ont brûlé nos femmes, nos enfants, dans le souterrain de la forêt de Nointel !

— À mort… à mort !




Mahiet, du haut du pont où sont massés les paysans, aperçoit au loin un cavalier arrivant à toute bride, le reconnaît bientôt et s’écrie :

— Rufin-Brise-Pot !

L’Avocat d’armes court au devant de l’écolier que suivent à une assez grande distance plusieurs groupes d’insurgés. Rufin, saute à bas de son cheval et dit à Mahiet :

— J’ai appris par les paysans que je précède qu’il y avait ici un grand rassemblement de Jacques, j’espérais te trouver parmi eux, sinon j’aurais battu le pays, afin de te remettre une lettre de maître Marcel… la voilà…

Mahiet prend la missive avec empressement, et pendant qu’il la lit, Rufin-Brise-Pot lui dit :

— Par Jupiter ! la compagnie d’une honnête femme porte vraiment bonheur ! Quand j’avais Margot-la-Savourée sous le bras, il m’arrivait toujours malencontre, tandis que rien n’a été plus heureux que mon voyage avec cette charmante Alison-la-Vengroigneuse,