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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés I (1850).djvu/39

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CHAPITRE III.

Lumineau, le chien favori, retrouve la piste. — M. Duriveau pénètre dans la tanière de Bête-Puante, — Résultat d’un viol commis par un vicomte sur une gardeuse de dindons. — Un dandy blasé. — M. Beaucadet est toujours à la hauteur des circonstances. — Mésaventure de M. Alcide Dumolard.

Les chiens, toujours muets et dépistés, parcouraient en tous sens la partie du bois où le braconnier avait interrompu la voie du renard, le vieux piqueur venait de rejoindre la meute ; stimulé par la présence de son maître et des personnes qui l’accompagnaient, le veneur parcourait attentivement l’enceinte, courbé sur son cheval, la tête baissée vers le sol, tâchant de revoir du pied de l’animal, et encourageant ses chiens par les mots consacrés :

Au retrouve, mes petits valets, au retrouve… mes beaux !

Le comte Duriveau, très-bon veneur lui-même, portant dans ses plaisirs l’ardeur et la fougue de son naturel, mais heureux surtout de cette occasion de cacher l’irritation que lui causait la conduite de Scipion, s’était éloigné de Mme Wilson et de sa fille et secondait son piqueur, appuyant les chiens à grand renfort de voix.

Pendant que le comte déployait cette activité fiévreuse qui le caractérisait, Scipion, indolemment renversé sur sa selle, balançant sa jambe gauche, s’amusait à faire résonner l’acier de son éperon sur l’acier de son étrier, qu’il avait chaussé jusqu’au cou-de-pied ; suivant, dans l’air, les légers tourbillons de fumée qu’il lançait de son cigare, ne disant pas un mot ni à Mme Wilson ni à sa fille, auprès de laquelle il se tenait alors.

Profitant d’un moment où sa mère, intéressée par les divers incidents de la chasse, détournait la tête, Raphaële approcha son