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Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/11

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peut pas aimer M. de Rochegune ; elle ne le peut pas : cet amour causerait ou sa mort ou mon malheur éternel… et je ne veux pas la mort de cette jeune fille, et je ne veux pas être éternellement malheureuse.

Il est impossible que je renonce à mon amour, que je retourne auprès de M. de Lancry ; il est impossible que j’aie touché de si près le bonheur pour le voir ainsi s’abîmer à mes yeux… il est impossible que je me voue à un avenir aussi affreux que serait le mien…

L’accomplissement de ces craintes m’eût semblé un rêve monstrueux. Cette accumulation de malheurs sur une seule créature ne passait-elle pas les bornes du possible ?

Dieu ne pouvait pas vouloir cela : c’était damner trop sûrement et trop facilement une âme… Je me révoltais contre cette implacable persécution de la destinée… Je demandais ce que j’avais fait… moi, pour que le sort me fût si fatal !

Alors je ne sais quelle voix à la fois sévère et paternelle me répondait :

« Et cette enfant, cet ange qui agonise, qu’a-t-elle fait ? et elle meurt… Son âme est