Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/12

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si pure, qu’elle ignore même l’amour qu’elle ressent… Elle ne l’a dit à personne… elle a langui… elle a souffert, elle ne s’est jamais plainte, elle ne se plaindra jamais, et elle meurt !…

« Comme les fleurs qui se flétrissent quand le soleil leur manque, et qui ignorent ce que c’est que le soleil… elle a senti l’amour qui ferait sa vie lui manquer… et elle s’est flétrie… Elle n’avait pas besoin… elle… de sophismes, de subtilités, pour justifier son amour… Elle était jeune et libre… Elle a aimé un homme jeune et libre comme elle… Son amour a été selon les lois de Dieu et des hommes… Elle a seize ans, et elle meurt…

« Ferme à jamais les yeux, pauvre enfant ; ton amour virginal sera enseveli avec toi… Ne crains rien… tout le monde l’ignorera comme toi. À voir tes deux petites mains pâles et amaigries croisées sur ton sein, on dirait que ton pudique instinct veut cacher cet amour, comme si on pouvait le deviner à travers la limpidité de ton âme… Dors… dors du sommeil éternel… Pauvre enfant… »