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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/128

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leur suppose imprimée par la force qui les a poussées au jour, ont dû nécessairement présenter, d’une part, des pentes fortes, et de l’autre, des rides, des ondulations, des dépressions. Il n’y avait là rien qui ne fût commun à toutes espèces de montagnes.

— Mais ici, cette circonstance, tout ordinaire qu’elle est, a suffi pour créer des torrents, tandis qu’ailleurs, où le sol s’est trouvé plus résistant, et le climat moins destructeur, les mêmes conditions n’ont produit que de simples ruisseaux.

Ainsi, deux causes seulement restent à examiner, qui dominent toutes les autres, et qui sont véritablement fondamentales : — la cause météorologique et la cause géologique. Par conséquent, c’est dans la nature même du sol et du climat des Hautes-Alpes que nous placerons désormais la première raison de la formation des torrents.

Dès lors, on commence à s’expliquer pourquoi les torrents forment un caractère spécial affecté exclusivement à cette partie des Alpes, qui semble attaché à son sol comme un mal endémique, et qu’on ne retrouve pas dans toutes les autres montagnes. — Ne considérons que la France. N’est-il pas digne de remarque que de pareils cours d’eau ne se montrent ni dans les Vosges, ni dans les Cévennes, ni dans l’Auvergne, pour ne citer d’abord que les montagnes qui sont à ma connaissance ? — Dans la Lozère, on a les vallats, espèces de ravins qui ne sont pas sans analogie avec nos plus petits torrents du troisième genre, comme ceux répandus entre Briançon et le Monestier, le long de la Guisanne : mais ceux-ci, qui, par leur faiblesse, ne ressemblent presque plus aux véritables torrents, sont encore, à côté des vallats, des torrents fort énergiques. — Les torrents des Pyrénées, nommés généralement Gaves dans le pays, sont des cours d’eau très-rapides, profondément encaissés, qui souvent même s’engouffrent dans des canaux souterrains, et qui seraient classés ici parmi les ruisseaux ou les rivières torrentielles. — On ne rencontre pas davantage de torrents, ni dans les montagnes de la Corse, ni dans celles du Jura.

Pourtant, parmi ce grand nombre de montagnes, plusieurs sont aussi nues et aussi déboisées que les croupes les plus chauves des Hautes-Alpes[1]. Ce n’est donc pas la destruction des forêts, ainsi qu’on le croit

  1. Il faut joindre ici aux Hautes-Alpes une partie des montagnes du département de