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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/134

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Ainsi l’humidité du climat empêche l’action des torrents par deux raisons également puissantes :

Premièrement, elle rend les ondées plus rares et moins violentes. Secondement, elle rend le sol plus solide en le recouvrant par une végétation plus vigoureuse. Elle diminue donc comme du même coup deux causes d’érosion.

S’il pouvait encore rester quelque doute sur le rôle actif que joue le climat dans la production des torrents, je citerais une observation générale qui a été faite depuis longtemps dans ces montagnes : — quand on parcourt les vallées dirigées de l’est à l’ouest, ou réciproquement, on remarque que les versants tournés du côté du nord sont généralement boisés ou tapissés de végétation, tandis que ceux tournés vers le sud sont dénudés et arides. On observe en même temps que les premiers sont beaucoup moins infestés par les torrents que les seconds ; et le contraste est souvent tel que l’on voit des revers horriblement mutilés par les torrents en face d’un autre revers sur lequel il n’en existe pas un seul[1].

— Or, il est évident qu’une pareille différence dans la manière d’être de deux revers, qui sont presque toujours formés des mêmes bancs de terrain, ne peut s’expliquer que par l’influence de l’exposition. Et comment agit l’exposition, si ce n’est en tempérant dans les versants tournés au nord les effets du soleil méridional ? Ils gardent plus longtemps les neiges, retiennent mieux l’humidité, sont à l’abri des vents brûlants du sud, jouissent de tous les avantages de l’ombre et de la fraîcheur, etc. Tous ces effets s’ajoutent, et soumettent en réalité ces versants à des conditions climatériques différentes de celles qui agissent sur les versants opposés, quoiqu’ils soient placés tous les deux sous le même ciel.


  1. Par exemple, dans la vallée d’Orcières, — dans la Vallouise.