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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/186

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un règlement spécial, qui fixât à chaque commune un chiffre maximum qu’elle ne pourrait jamais dépasser. Ce maximum serait basé sur la superficie des terrains conservés aux pâturages.

Il faut bien se le rappeler : les bestiaux ne sont nuisibles que parce qu’il n’existe pas de mesure dans leur nombre, ni de police suffisamment sévère dans leurs pacages. Moins nombreux, leur influence serait moins sensible. Elle serait nulle, si on les confinait sur les plateaux, sur les cols, sur les montagnes pastorales proprement dites, partout enfin où les pentes sont douces et accidentées. — Il ne s’agit pas de prohiber les troupeaux ; ce qui serait une absurdité. Mais il s’agit de les proportionner aux ressources de la contrée ; ce qui est une mesure sage et nécessaire.

On fait contre cette diminution des troupeaux plusieurs objections. — On les prône comme formant la seule richesse du pays ! On ne réfléchit pas qu’il y aurait ici d’autres sources de richesses dans les produits du sol, et que les ravages causes par les troupeaux ne permettent pas d’en tirer parti. — On les représente comme l’unique ressource du pauvre ! Or, cela n’est pas. Les troupeaux sont tous ici la propriété des riches ; les pauvres ne supportent guère que les charges de cette spéculation, qui dévaste la contrée, pèse ainsi sur tous et ne profite qu’à un petit nombre. — On dit aussi que la diminution des troupeaux entraînerait celle des engrais, qui sont déjà aujourd’hui si rares et si recherchés. Mais je demanderai s’il faut absolument un si grand nombre de bêtes pour fournir aux besoins de l’agriculture dans une contrée où l’étendue des champs cultivés n’arrive pas au tiers de la superficie totale[1] ? Et dans le cas où l’on me répondrait affirmativement, je prierai qu’on m’explique comment la plupart des autres départements s’y prennent pour cultiver

  1. La superficie totale de ce département est de 553 500 hectares.

    Elle renferme : 

    en terres labourables et prairies artificielles, ci 147 300  hectares
    en prairies naturelles ............... 15 000
    en vignes ............... 4 500
    Total ............... 166 800

    Ce qui n’arrive pas au tiers de la superficie totale. Le reste est occupé par les pâturages, les bois, les chemins, les rivières, les torrents, et surtout par les rochers et les terres incultes qui comprennent une aire de 296 800 hectares : c’est plus de la moitié de la superficie totale.