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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/219

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De cette observation, découlaient deux faits, également importants : premièrement, qu’il était possible de boiser les dunes ; secondement, que le résultat du boisement était de fixer les sables[1].

N’est-ce pas exactement ce qui se présente dans les Alpes ? Ici aussi la possibilité du boisement ainsi que son efficacité sont démontrées de la manière la plus rigoureuse, soit par l’exemple des torrents éteints, soit par l’observation de ce qui est arrivé sur certains revers, que le simple régime de la réserve a suffi pour recouvrir de végétation, et sauver contre l’envahissement des torrents. — Quoi de surprenant, d’ailleurs, que la même cause soit combattue par les mêmes moyens ?

Lorsqu’en 1780, l’ingénieur des ponts et chaussées Bremontier, après avoir attaqué le phénomène de la marche des dunes par sa face scientifique, vint à proposer un projet régulier de plantations, comme l’unique défense qui pût lui être opposée avec succès, on ne manqua pas de se récrier d’abord sur l’impossibilité d’appliquer son système. Les premiers essais ne furent entrepris qu’en 1787, puis abandonnés en 1793, à cause des difficultés suscitées par les habitants du pays. — En 1806, les travaux étaient repris sur une échelle plus large, et au compte de l’État. — Bientôt l’expérience, modifiant les procédés indiqués d’abord par Bremontier, en fit découvrir de nouveaux, plus sûrs et plus économiques que les premiers[2]. Aujourd’hui, l’administration poursuivant sa tâche avec constance, éclairée par un demi-siècle de tâtonnements, et maîtresse enfin de son sujet, a organisé dans les Landes un ensemble de travaux, dont l’admirable succès se confirme de jour en jour.

L’analogie n’eut-elle pas frappante, entre les travaux accomplis dans les Landes, et ceux qu’il conviendrait d’ouvrir dans les Alpes ? De part et d’autre, n’est-ce pas la même cause, et le même remède, et les mêmes dangers pour la contrée, et le même devoir pour l’État ? Si l’État pratique à ses frais les premiers travaux, sous quel prétexte se refuserait-il à se charger des seconds ?

  1. Bremontier parle d’une vaste forêt qui s’était établie sur une portion des dunes, et qui l’avait fixée. Un incendie dévora le milieu de la forêt, et les sables se mirent en mouvement sur le terrain dénudé, tandis que les parties épargnées par le feu demeurèrent stables. — C’est dans cette sorte de clairière qu’il fit ses premiers essais de plantation. (Voir son Mémoire, Annales des ponts et chaussées, t. VII.)
  2. Voir la Notice sur les travaux de fixation des dunes, par Lefort, élève ingénieur, Annales des ponts et chaussées, t. II.