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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/220

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Serait-ce qu’ils sont plus ardus et d’un succès moins certain ? — Mais loin de là, l’exécution en est incontestablement plus facile, et la réussite des premiers démontre, à fortiori, le futur succès des seconds. Et qui donc oserait mettre en parallèle ces deux choses : — d’une part, la résistance obstinée qu’opposent aux plantations ces sables arides et mobiles, que le moindre souffle disperse dans les airs, et dont la nature est si essentiellement hostile à la végétation, qu’ils ont formé des déserts sur tous les points du globe où les révolutions géologiques ont pu les disperser ; — de l’autre part, les difficultés que peut offrir le reboisement de revers calcaires, qui étaient, il y a peu de siècles, chargés d’épaisses forêts, où il n’y a, pour ainsi dire, qu’à refaire le passé, et dont le sol est tellement propice aux arbres, que ceux-ci, dans la plupart des cas, y apparaissent spontanément par milliers, dès qu’on a écarté les causes de perturbation venant du fait de l’homme.

Serait-ce que les travaux des Alpes auraient moins d’importance que ceux des Landes ? — Mais n’est-il pas évident que l’importance est la même des deux côtés, puisqu’il s’agit, d’une part comme de l’autre, de prévenir la ruine d’une contrée, de sauver les habitations et les cultures, et de donner de la valeur à des terrains improductifs ?…

Disons-le avec franchise. Si les dunes occupent depuis longtemps la sollicitude de l’administration, c’est que les dangers qu’elles sèment devant elles ont été depuis longtemps étalés au grand jour, tandis que les désastres des torrents sont restés à peu près inconnus, hors du champ dont ils consomment si visiblement la ruine. — C’est que l’habitant des Alpes, isolé dans ses obscures vallées, s’est courbé jusqu’à ce jour sous la main du fléau, en homme qui n’espère aucun secours et ne croit plus à sa délivrance, tandis que les dunes s’avançant près des portes de Bordeaux, le mal se passait sous les murs d’une ville puissante, égale en importance à une capitale, sous les yeux d’une population active, éclairée, influente, qui n’a pas hésité à le signaler à l’attention de l’État, qui a fortement élevé la voix pour réclamer son intervention, et qui a dû, nécessairement, finir par l’obtenir.

On voit, par ces seuls faits, que je ne propose rien de nouveau, ni d’insolite, rien qui ne soit dûment légitimé par des exemples antérieurs. — Les Hautes-Alpes ne sont pas en état de reboiser à leurs frais leurs montagnes, pas plus que la Corse ne serait en état de solder les 5 millions de routes qu’on lui perce dans ce moment ; pas plus que les Landes ne seraient en état de reboiser leurs dunes. C’est donc au gouvernement à faire