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Page:Suzie Kerry Michette au harem 1926.djvu/16

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Michette se creusait la cervelle pour découvrir le moyen qui les délivrerait de ce témoin gênant et réfrigérant, mais sans succès, lorsque tout à coup l’idée lui vint de montrer à sa conquête quelque numéros de Paris-Plaisirs, dans lesquels se trouvait la photo d’une petite Michette dénudée et emplumée. Elle dit donc au jeune Anglais de lui descendre sa valise du filet tandis qu’elle-même dévoilait la lampe, chassant l’ombre du compartiment. Elle se disposait à ouvrir sa valise lorsqu’une voix aigre s’éleva :

— Mademoiselle, veuillez remettre la lampe en veilleuse, je vous prie.

Michette se retourna, comprenant tout le parti qu’elle pouvait tirer de l’incident.

— Ma bonne femme, si la lumière vous gêne allez donc voir ailleurs s’il fait plus sombre. Quant à moi, j’ai besoin de voir clair !

— Ah ! vous avez besoin de voir clair ? Eh bien ! moi, j’ai besoin de dormir ! répliqua la voyageuse.

Et se redressant avec la vivacité d’un aspic, elle voulut faire fonctionner le système veilleuse, mais elle trouva devant elle le jeune Anglais, implacablement planté entre elle et l’objet du litige qui lui dit un « don’t » grave et sans réplique. Alors sa fureur éclata :

— Péronnelle ! malapprise ! Quelle honte de rencontrer des gens aussi vulgaires que vous et ce goujat qui suit vos jupes… Et m’appeler, moi ! « ma bonne femme »… Nous n’avons pas gardé les porcs ensemble, que je sache, mademoiselle !

— Oh ! je n’en doute pas, sourit Michette très amusée, vous avez sûrement fait ce beau métier-là toute seule !

— Oh ! c’est trop fort ! c’est trop fort ! suffoqua la dame. Puis, ne sachant plus que dire, elle se drapa dans un grand air outragé et supérieur et déclara en prenant ses objets de voyage :

— Je vous laisse la place… La bêtise a toujours raison !