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Page:Suzie Kerry Michette au harem 1926.djvu/30

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J’épouserais, ajoute-t-il la main solennellement posée à la place du cœur.

— Et quoi encore ? gouaille Michette. J’épouserais… voilà… Il a tout dit… J’épouserais. Et tu crois que ça m’irait, à moi… moi, Michette, de Paris, tu crois que ça m’irait d’entrer au harem et de faire la… quel numéro, à propos combien as-tu de femmes ?

— Quatre-vingt-deux.

— … Alors, je ferais la quatre-vingt-troisième ? Ben, on ne doit pas souvent coucher avec le patron dans ton… truc, surtout qu’à te voir, mon pauvre type… oui, enfin… ça doit être rare ! ! Je comprends que les poules d’ici s’arrangent entre elles ! Mais très peu pour moi !

— Oh ! réplique un peu offusqué le maharajah, je couche seulement avec une ou deux. Les autres… c’est des femmes pas riches qui veulent entrer au harem, ou des cousines, des tantes, des grand’mères… Je peux pas refuser parce que je suis riche et je dois… Mais je enverrai tout ça loin dans une maison à moi, et tu seras ma houri, ma femme et la seule princesse… Dis que tu veux bien ?

Tout de même, malgré son insouciance, Michette balance un peu… Le luxe fabuleux des princes hindous, que ses lectures sur les Indes lui ont dévoilé, la perspective de devenir princesse et maîtresse d’un de ces magnifiques palais qu’elle a pu admirer depuis qu’elle a mis le pied sur cette terre mystérieuse et séduisante, font chavirer son imagination. Mais elle se reprend… Qu’est-ce qu’elle y fera dans ce palais, à côté de ce gros ventru… Et toutes ces splendeurs… Il faudra qu’elle les paie de sa liberté… et de sa personne… Et son Panam, son vieux Panam… Adieu, sans doute… Bast, on n’a pas besoin de tant d’argent sur la terre pour être heureux… Et aucun trésor ne vaut l’indépendance… la chère, l’admirable, la merveilleuse indépendance pour une nature comme celle de Michette.

— C’est oui ? interroge le maharajah qui sent l’hésitation de Michette et qui croit l’avoir conquise.