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Page:Suzie Kerry Michette au harem 1926.djvu/32

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— Je veux m’en aller. Si vous ne me lâchez pas de votre plein gré, on viendra bien me chercher… J’ai des amis, moi, qui ne m’abandonneront pas… Et alors je vous ferai tous arrêter… Bande de fripouilles !… Ouvrez !… Ouvrez !… Ouvrez !…

En vain… La pauvre Michette s’épuise en rage impuissante. La grande salle où on vient de l’introduire est d’un calme, d’un silence que troublent seuls les cris et les objurgations de la jeune femme qui, finissant par se rendre compte de l’inanité de ses efforts, se laisse tomber sur un divan et éclate en sanglots entrecoupés d’imprécations.

Enfin elle se calme un peu, et elle se prend à envisager la situation plus froidement. A-t-elle peur ? Elle ne veut pas se l’avouer, cependant le mystère de son aventure l’angoisse quand même, malgré qu’elle se répète que « ces sauvages » risqueraient trop à maltraiter une européenne. Mais que peuvent-ils lui vouloir ?!!… Elle se promenait bien tranquillement hier dans la ville pour faire un peu de footing ; elle avait pris une rue déserte, mais délicieusement ombragée et elle admirait l’harmonie que formaient le chemin sablé de rouge et les larges feuillages verts, lorsqu’une auto à laquelle elle n’avait pas pris garde s’arrêta à sa hauteur et, avant même qu’elle ait pu faire « ouf ! » deux hindous en sautaient et se précipitaient sur elle, l’immobilisant et lui entourant le visage d’une longue écharpe pour étouffer ses cris… Et, en moins de deux secondes, elle se retrouvait au fond de la voiture. Elle n’avait pu voir le chemin suivi mais il ne devait pas être long, car maintenant qu’elle pouvait voir à nouveau, elle se rendait compte que la nuit n’était pas encore venue.

Les rayons du soleil couchant dorent et rougissent la pièce où Michette se trouve, une pièce bizarre, presque carrée mais très haute, très vaste ; un divan en fait presque complètement le tour, des coussins s’y trouvent à profusion semés ; à terre de gros poufs servent de sièges, des petites tables sont disposées ici et là. Mais ce qui frappe surtout Michette c’est que cette pièce ne prend jour que par le