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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/248

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ces mythologiques et les grands superlatifs italiens et latins.

Un troisième point non moins visible est que notre seigneur antiquaire est Italien, homme du Midi. Le climat convie à cette architecture ; beaucoup de constructions, imitées chez nous pendant nos siècles classiques et absurdes sous notre ciel, sont raisonnables ici, et partant belles : d’abord les grands portiques à arcades ouvertes ; on n’a pas besoin de fenêtres, même il vaut mieux qu’il n’y en ait pas ; on s’y promène surtout pour prendre le frais. Il convient de plus que tout y soit en marbre ; dans le Nord, on y aurait froid par la seule imagination, on penserait involontairement aux tentures, aux paillassons, aux calorifères, aux tapis, à tout l’appareil du bien-être indispensable. Au contraire, un duc, un prélat en robe violette, en grande représentation, entouré de ses gentilshommes, est justement ici à l’endroit qu’il lui faut pour causer des affaires d’État ou écouter un sonnet. De temps en temps, dans sa promenade majestueuse, il peut jeter un coup d’œil sur les statues, sur les bustes des empereurs, faire tout haut à leur sujet le latiniste ou le politique, s’intéresser sincèrement à leur vie et à leurs images par une sorte de parenté, à titre de successeur. Il est encore très-bien ici pour recevoir les artistes, patronner les débutants, commander ou examiner des plans d’édifice. S’il entre dans les allées, elles sont assez larges et assez unies pour que sa robe ne s’accroche point et que son cortège s’y déploie. Le jardin et les bâtiments sont excellents pour tenir une cour à ciel ouvert.

Les points de vue, les morceaux de paysage qu’on aperçoit au bout des galeries, encadrés entre les colon-