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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/354

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végétale, animale et humaine ; les vivants y retournent pour en sortir sous d’autres formes ; au-dessus de la grande masse inerte et minérale, ce fumier est la seule portion mobile qui s’élève, puis retombe, selon le va-et-vient du tourbillon de la vie. Certainement en aucun endroit du monde il n’a été plus agité de fond en comble et plus bouleversé qu’ici.

On pénètre avec des torches dans les chambres souterraines, étançonnées, d’où l’eau suinte. En promenant la torche sur les murs, on voit reparaître un à un de jolis ornements, des oiseaux, des feuillages verts, des grenadiers chargés de leurs fruits rouges ; c’est encore le goût simple et sévère de la saine antiquité, tel que le montrent Pompéi et Herculanum.

Le soleil baissait dans une grande brume pâle ; le vent lourd, aveuglant, soulevait la poussière par saccades ; sous ce double voile, les rayons mornes comme ceux d’un bloc de fer rougi s’éteignaient vaguement dans la désolation infinie. Au sommet d’un escarpement, on apercevait une misérable ruine vacillante, l’acropole de Fidènes, et sur un autre le carré noirci d’une tour féodale.


22 mars.


Aujourd’hui course à pied à Frascati ; le ciel est nuageux, mais le soleil perce par places la lourde coupole de nuages.

À mesure que l’on s’élève vers les hauteurs dévastées de Tusculum, la perspective devient plus grande et plus triste. L’immense campagne romaine s’étend et s’étale