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Page:Tinayre - La Rancon.djvu/297

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quand le frêle cachet de la lettre serait rompu. Il prit enfin congé de Jacqueline. Elle retint insensiblement la main qu’il lui tendait :

— Pendant notre absence… — sa voix tremblait — n’est-ce pas, vous verrez souvent notre ami Chartrain… vous lui parlerez de nous… Ensemble, vous penserez à votre pauvre Algérienne ?

— Je vous le promets, et je n’aurai point de mérite à tenir ma promesse. Étienne est mon ami. Je le distrairai de mon mieux… et nous parlerons de vous, notre amie commune.

Que soupçonnait-il ? Que savait-il ?… Il ne savait rien, il soupçonnait tout. De mystérieux indices l’avaient averti. « Ah ! se disait-il, en quittant madame Vallier, au moment où elle ne pouvait plus retenir ses larmes, si cette femme aime Chartrain, ce ne peut être que d’un amour si sublime qu’il échappe à nos jugements… Ni le caprice, ni la sensualité, ni l’intérêt ne peuvent attacher une femme brillante et courtisée à cet homme mûr et mélancolique. Que s’est-il passé entre eux ? On ne le saura jamais, mais il est certain qu’ils ont dû prendre une grave résolution. Pauvre Chartrain !… Il a vieilli de dix ans depuis quelques semaines. Bah ! c’est l’éternelle histoire