Page:Tolstoï - La Famine, 1893.djvu/81

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lui-même, dans les conditions les plus dures, la nourriture que nous voulons lui donner. Nourrir le paysan, c’est comme si, au printemps, lorsque l’herbe est déjà poussée, au lieu de laisser le bétail brouter l’herbe lui-même, on le tenait à l’étable en cueillant pour lui cette herbe et en privant ainsi le troupeau d’une force énorme dont l’absence le fait périr.

Quelque chose d’analogue serait arrivé au paysan si nous nous mettions à le nourrir de cette manière et s’il avait cru à cela. Si le paysan ne parvient pas à joindre les deux bouts, c’est un déficit ; s’il n’a rien à manger, il faut le nourrir. Mais observez n’importe quel paysan, non pas pendant la disette, mais pendant une année normale, lorsque, comme dans notre localité où la