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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/100

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— Je vous passe les fourmilières. Mais n’avez-vous pas sous les yeux ce qu’il vaut le mieux regarder vivre ? Une femme gracieuse, et d’une âme si ténue, si insaisissable, qu’on l’a dû tisser avec ces fils de la vierge qui se balancent dans le soleil du matin.

— Voilà, c’est que si je regarde Nane, j’ai envie de la toucher. Et cela me met dans une situation fausse, qui me gêne pour observer.

— Essayez une journée seulement ; vous serez baba. Si vous saviez ce que les drames de la vie font pâlir les inventions des romanciers.


Huit jours après, au bar de la Brinvilliers, dans le tumulte triste de minuit :

— Eh bien, philosophe, vous aviez raison : j’ai suivi toute une journée de Nane, pas à pas, ou de ma pensée. Rien de plus extraordinaire.

— Dites-moi ça. On a toujours plaisir à voir ses théories vérifiées — par les autres.

— C’était mardi ; et voici comment les choses se passèrent. Je n’exagère en rien, et m’appuie, outre mes observations personnelles, sur le rapport que la maison Simpson-Schuhmacher, place des Victoires, m’a fourni au prix de deux livres sterling : «