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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/39

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z avec moi un peu plus loin, ajouta-t-elle, voulez-vous ? J’ai peur de rester seule, à me sentir comme ça toute disloquée. » Je pris sa gauche, et comme nous passions par la rue Royale, elle accepta de s’arrêter un moment pour boire n’importe quoi de réconfortant. Nous descendîmes donc, elle un peu patraque encore ; mais une demi-heure plus tard nous étions devant notre vin de Porto à plaisanter le plus gaîment du monde sur sa chute, dont au reste il ne semblait lui rester rien qu’un peu de gêne à être assise.

Si la conversation tendait à languir (car on ne peut constamment à deux, dont une femme, frapper des pensées ingénieuses), aussitôt elle se battait légèrement les côtés, ce qui faisait lever de la poussière. Et de rire tout de nouveau, à petits éclats : car elle est d’un esprit simple ; et si elle s’est une fois résolue à juger une chose drôle, elle pourrait se la représenter cent jours de suite et s’en réjouir encore d’aussi bon cœur.

Cependant le temps avait coulé, il y avait près d’une heure déjà que l’odeur répandue de l’absinthe nous présageait le soir et que les Parisiens fussent près de se nourrir :

— Si nous dînerions ici ? dis-je.

— Je ne vous cacherai pas, me répondit