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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/41

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par une aigre et dévote tante de Bélesbat, sa seule héritière. Mais, dans une demi-paresse, et sans trop chercher que les jeux de son corps lui procurent un lustre nouveau, Nane laisse les heures glisser sur elle sans la meurtrir, telles au printemps les gouttes d’une pluie ensoleillée sur la fleur nouvelle.

Ce soir, elle s’est vêtue d’un peignoir assez ajusté en crêpe de Chine vert, mais du vert le plus faux, le plus agaçant, le plus délicieux. Elle a des dessous, semble-t-il, tout blancs ; au moins ses bas le sont-ils, et la peau de ses pantoufles. Sa chevelure, qui a comme ses yeux la patine de ces bronzes que le baiser des pèlerins a jaunis, est retroussée par devant, à la Messaline. Son col long et sa nuque portent un triple collier d’émaux verts, dont elle a aussi une ceinture.

Elle est ainsi tout à fait prenante. Et moi qui l’avait vue cent fois, sans y prendre autrement garde qu’à tous ces articles de Paris qui plaisent à notre habitude sans atteindre notre curiosité, il lui a fallu, pour que je la remarque, se laisser choir avec éclat d’une impériale sur les sordides travaux de l’Orléans. D’ailleurs elle ne l’a pas fait exprès.

— Vous rappelez-vous, Nane, quand nous