Aller au contenu

Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’on pût renouer plus tard. Car il savait aussi quel maladroit sacrilège c’est de reprendre une femme après un long intervalle ; et que le vin de Jurançon qu’on laisse, après en avoir bu, s’éventer dans la bouteille, n’est plus bientôt qu’une topaze insipide.

Jacques recula pourtant jusqu’à ses fiançailles, même un peu au delà. Déjà le mariage, sans avoir été annoncé, était connu un peu partout ; et il s’étonnait que Nane n’en fût pas encore avertie. Rien que sa mine à lui, et quelques précautions toutes nouvelles qu’il prit pour qu’on ne les vît pas trop publiquement ensemble, auraient dû la mettre en éveil. Mais il n’y parut rien, et quand Jacques enfin ne put pas reculer davantage, il n’osa affronter la scène prévue de désespoir : peut-être eut-il peur plus encore que Nane ne lui rît au nez en disant : « Je le savais. » Bref il prit le parti d’écrire.

La lettre était joviale, trop joviale ; et il y avait aussi le souvenir d’usage, mais assez gros pour consoler le plus solide désespoir de veuve. Jacques avait même éprouvé quelque joie en donnant par avance cette direction imprévue à l’argent Blokh.

Ayant lu la lettre de Jacques, qui décidément