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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/133

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gros, au visage flegmatique, à moitié endormi. C’était le médecin du régiment.

Il portait d’une main une cruche de terre pleine d’eau à toute éventualité ; sur son épaule gauche se balançait le sac contenant les instruments de chirurgie et les bandes de pansement. Il était facile de voir qu’il avait l’habitude de faire des promenades de ce genre, et que ces courses matinales constituaient le meilleur de son revenu. Chaque duel lui rapportait huit louis — quatre louis par combattant.

M. Von Richter portait l’étui renfermant les pistolets. M. Von Daenhoff faisait tourner dans sa main une cravache, évidemment pour se donner du chic.

— Pantaleone, dit Sanine à voix basse… si je tombe… tout peut arriver… prenez dans ma poche un petit paquet… il contient une fleur… vous remettrez ce paquet à la Signorina Gemma. Vous comprenez ? Vous me le promettez ?

Le vieil Italien lui jeta un regard douloureux et branla affirmativement la tête. Mais Dieu sait s’il avait compris ce que Sanine lui demandait.