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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/141

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gard hautain jeté par-dessus l’épaule, il représenta le commandeur Sanine.

Emilio écoutait dévotement, interrompant parfois le récit par une exclamation, ou se levant d’un élan pour embrasser son héroïque ami.

La voiture roula sur le pavé de Francfort et stoppa enfin devant l’hôtel de Sanine.

Il gravissait le deuxième étage accompagné de ses deux amis, lorsque tout à coup de la pénombre du couloir surgit à pas pressés une femme, le visage voilé. Elle fit une pause devant Sanine, eut un léger balancement de tout le corps, poussa un soupir haletant, et courut dans la rue où elle disparut au grand étonnement du garçon d’hôtel, qui déclara que « cette dame avait attendu pendant plus d’une heure le retour de Monsieur. »

Bien que l’apparition fût très rapide, Sanine avait reconnu Gemma. Il avait distingué les yeux de la jeune fille sous l’épais tissu de soie du voile couleur de cannelle.

— Est-ce que Fraülein Gemma se doutait de quelque chose ?… demanda-t-il en allemand d’un air mécontent à Emilio et à Pantaleone qui étaient toujours sur ses talons.