Aller au contenu

Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/333

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Polosov mange une poire que Sanine lui a préparée, et Maria Nicolaevna le regarde, lui, son serf, avec ce sourire qu’il connaît déjà, le sourire du propriétaire, du seigneur…

Mais, ô Dieu ! là, au coin de la rue, un peu après la sortie de la ville — n’est-ce pas de nouveau Pantaleone ? Et qui est avec lui ? Emilio ! Oui, ce beau garçon enthousiaste, qui lui était si fort attaché.

Y a-t-il longtemps que ce jeune cœur adorait en lui un héros, un idéal ? — Et maintenant son pâle et beau visage, si beau que Maria Nicolaevna l’a remarqué et se met à la portière pour le regarder, — ce visage est plein de rage et de mépris. Les yeux, qui ont tant de ressemblance avec d’autres yeux, s’attachent sur Sanine et les lèvres se serrent… puis s’ouvrent brusquement pour lancer l’injure…

Et Pantaleone étend la main et désigne Sanine — à qui ? À Tartaglia qui est là, lui aussi, et Tartaglia aboie contre Sanine, et l’aboiement de cet honnête chien résonne à ses oreilles comme une injure intolérable… Quelle honte !

Enfin — la vie de Sanine à Paris et toutes