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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/47

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moquerie, comme si elle ne croyait pas à tous ces serments enthousiastes, à toutes ces paroles enflammées, dont l’auteur, du reste, s’abstenait le plus possible.

La soirée passa si vite, que Sanine ne se souvint qu’il devait partir ce soir-là que lorsque la pendule sonna dix heures.

Il bondit de sa chaise comme si un serpent l’eût piqué.

— Qu’avez-vous ? demanda Frau Lénore.

— Mais je dois partir ce soir pour Berlin, j’ai déjà retenu une place dans la diligence.

— Et quand part la diligence ?

— À dix heures et demie.

— Alors vous arriverez trop tard, dit Gemma… Restez encore un peu… je continuerai ma lecture…

— Avez-vous payé la place entière ou seulement donné des arrhes ? demanda Frau Lénore.

— J’ai payé la place entière ! répondit Sanine avec une grimace douloureuse.

Gemma le regarda en clignant des yeux, et partit d’un éclat de rire. Sa mère la gronda.

— Comment, ce jeune homme a dépensé de