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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/85

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au lieu de décrire des méandres pittoresques ; il critiqua aussi le chant d’un pinson qui ne variait pas assez ses thèmes.

Gemma ne paraissait pas s’ennuyer, même elle avait l’air de s’amuser plutôt, et cependant Sanine ne reconnaissait pas la Gemma de la veille ; nulle ombre pourtant n’attristait son visage, jamais sa beauté n’avait eu plus de rayonnement, mais son âme semblait repliée sur elle-même.

L’ombrelle ouverte, gantée, elle marchait légèrement, sans hâte, comme se promènent les jeunes filles bien élevées, et elle parlait peu.

Emilio n’avait pas l’air non plus de se sentir tout à fait à son aise, et Sanine encore moins que lui. Le jeune Russe d’ailleurs était un peu gêné par l’obligation de parler tout le temps allemand.

Seul Tartaglia se sentait libre de toute contrainte ! Il poursuivait les merles avec des aboiements frénétiques, sautait par-dessus les fossés et les troncs renversés, se plongeait dans les ruisseaux, lapait l’eau à grandes gorgées, se secouait, jappait, puis partait comme