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Page:Tourgueniev - Fumée.djvu/29

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distinguer les Italiens, les Moldaves, les spirites américains, les fins secrétaires des ambassades étrangères, ou bien les jeunes barons allemands à figures d’usuriers doucereux, qui papillonnaient autour d’elle. À l’entour de cet astre stationnaient : la princesse Babette, la même dans les bras de laquelle expira Chopin (on compte en Europe environ mille dames qui eurent cet honneur) ; — la princesse Annette, à laquelle nul n’aurait pu résister, si tout à coup, comme une subite odeur de choux à travers celle de l’ambre, ne perçait en elle une grosse blanchisseuse de village ; — la peu chanceuse princesse Pachette : son mari venait d’être promu à un poste de gouverneur de province, et tout à coup, Dieu sait pourquoi, avait battu le maire de sa ville et emporté 20,000 roubles appartenant à la couronne ; — enfin la turbulente mademoiselle Zizi et la larmoyante mademoiselle Zozo ; — et toutes, elles abandonnaient leurs compatriotes et n’avaient pour eux que des rigueurs. Laissons de côté, nous aussi, toutes ces ravissantes dames, éloignons-nous du fameux arbre à l’ombre duquel s’étalent des toilettes où le mauvais goût l’emporte encore sur la dépense, et Dieu veuille alléger l’ennui qui les ronge !