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Page:Tourgueniev - Fumée.djvu/47

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a répondu : « Non, on ne peut pas ; j’ai deux comtes à dîner aujourd’hui, va-t’en ! »

— Mais, permettez, c’est une calomnie, s’écria Bambaéf.

— Calomnie ! calomnie ! En premier lieu, le prince Vakhrouchine qui a aussi dîné chez votre Mikhnéef…

— Le prince Vakhrouchine, interrompit sévèrement Goubaref, est mon cousin germain, mais je ne le laisse pas entrer chez moi. N’en parlons pas.

— En second lieu, continua madame Soukhantchikof, en inclinant humblement la tête vers Goubaref, Prascovia Iakovlevna me l’a dit à moi-même.

— Vous avez trouvé là sur qui vous appuyer ! Elle et Sarkisof sont les premiers faiseurs de fausses nouvelles.

— Excusez-moi, Sarkisof est un menteur, c’est vrai ; il a même dérobé le drap qui couvrait le cercueil de son père, je ne disputerai jamais là-dessus, mais Prascovia Iakovlevna, quelle différence ! Souvenez-vous comme elle s’est noblement séparée de son mari. Mais, je le sais, vous êtes toujours prêt…

— Finissons, Matrena Semenovna, laissons ces récriminations et occupons-nous de choses plus élevées. Vous savez que chez moi brûle toujours le feu sacré. Avez-vous lu Mademoiselle de la Quintinie ? Quelles délices, et cette fois ce sont bien là vos principes !