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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/384

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payer : elle détermine dans son Conseil la somme qu’elle croit nécessaire au besoin de son État ; elle fixe, par les commissions des tailles et par les arrêtés de son Conseil, la portion dont chaque généralité et chaque élection doivent contribuer au payement de la somme totale.

La contribution de chaque élection se répartit entre les paroisses dans l’assemblée qui se tient chaque année pour le département, laquelle est composée de l’intendant, de deux officiers du bureau des finances de la généralité, et des élus ou officiers du tribunal qu’on appelle l’élection. Quand la somme que doit payer chaque paroisse est ainsi arrêtée au département, l’intendant en avertit chaque communauté par des mandements adressés au corps des habitants, et portant ordre de répartir entre eux sur chaque contribuable, à raison de ses facultés, la somme imposée sur la totalité de la paroisse. C’est donc à la communauté que les deniers de l’imposition sont demandés ; c’est à la communauté à faire remettre la somme entière sans non-valeur entre les mains du receveur des tailles. La répartition de ce qui doit être payé par chaque contribuable est J’affaire de la communauté, et non pas celle du roi, qui n’y peut intervenir que comme le protecteur et Je défenseur de tous ceux auxquels on fait injustice.

Il suit de là que, si quelqu’un des particuliers compris dans le rôle est hors d’état de payer, c’est à la communauté entière à payer pour lui. Si un contribuable trop taxé obtient sa décharge, c’est à la communauté à remplir le déficit qui en résulte. Si le collecteur chargé de la levée des deniers les dissipe au lieu de les porter à la recette des tailles, c’est encore la communauté qui fait les deniers bons de sa banqueroute au roi, lequel reçoit toujours la totalité de la somme imposée. Ainsi, tous les contribuables de la communauté sont regardés comme débiteurs solidaires répondant les uns pour les autres, répondant pour la communauté, comme elle pour eux, de la somme imposée.

Ce système, qui présente l’apparence de la simplicité et de la facilité, et celui d’une recette toujours assurée, a des avantages ; il a aussi des inconvénients, même très-graves, qui peuvent être diminués par différents moyens, mais qui ont été et sont encore fort grands dans les pays de taille personnelle. L’expérience a montré que la simplicité et la facilité que cette méthode présente dans le commandement, ne se trouvent pas à beaucoup près dans l’exécution.